Sans doute avez-vous déjà vécu cet état où, absorbé entièrement par la tâche que vous accomplissez, vous oubliez totalement le temps, le monde autour de vous. Vous éprouvez une joie intense, résultant de ce que vous faites, de l’objectif que vous êtes en train d’accomplir en mode quasi-automatique (c’est un domaine que vous maîtrisez). Vous vous oubliez, vous êtes totalement présent et un peu dans un état second qui ressemble à une transe, à l’extase. Bienvenue dans le flow !
Les sportifs, les musiciens, écrivains vivent souvent ces états, les enfants absorbés à construire pendant des heures un édifice en Légo, un jardinier tout entier à s’occuper de ses plantes… Activité mentale ou physique, peu importe. Le footballeur brésilien Pelé évoque dans sa biographie ce que les sportifs préfèrent baptiser la « zone » : « J’ai eu l’impression de pouvoir courir une journée entière sans fatigue, de pouvoir dribbler à travers toutes leurs équipes, que je pouvais presque leur passer à travers physiquement.»
Le Flow n’a rien de surnaturel. Pour les spécialistes du cerveau, cette attention sélective sur une tâche précise, est générée, gérée et contrôlée dans le cortex frontal, cette partie du cerveau plus développée chez l’homme que chez l’animal. Le neuromédiateur qui entre en jeu pour son bon fonctionnement est la noradrénaline.
Joie intense, efficacité maximale
C’est le célèbre psychologue hongrois Mihály Csíkszentmihályi qui a, le premier, théorisé le flow en 19750. Pour identifier les purs moments de joie de l’être humain, il a interrogé 8 000 personnes d’éducation, de culture et de niveau social différents à travers la planète. Ses conclusions développées dans son livre « Vivre » se résument ainsi : « Pour entrer dans le flow, ressentir cette joie optimale, il faut se situer entre l’état d’excitation et de contrôle. La tâche entreprise est un défi, elle est réalisable mais demande une concentration profonde. Votre être tout entier est impliqué, et vous utilisez vos compétences à l’extrême sans percevoir l’effort comme une douleur. Le souci de soi (l’ego) disparaît au profit du sens de soi, les heures deviennent des minutes, on a le sentiment de contrôler pleinement son action, d’en être totalement responsable. » La personne perçoit alors cette activité comme particulièrement plaisante et atteint une productivité optimale. La concentration évite des émotions et pensées négatives.
Cet état peut être développé au quotidien dans tous les domaines. Appliqué au monde de l’entreprise, de l’éducation, le flow est une bonne méthode pour éviter l’agitation, l’éparpillement et apprendre à ne pas générer de stress inutile. Elle permet de renforcer sa confiance en soi.
Vivre le flow le plus souvent possible
Plusieurs éléments constituent une expérience de flow.
1. Les compétences sont en adéquation avec la difficulté de l’activité. Il n’y a ni anxiété, ni ennui puisque l’objectif est clair et réalisable.Si les défis sont trop faciles, on peut revenir à cet état de flow en les corsant. Si à l’inverse les défis sont trop difficiles, il est possible de revenir à l’état de flow en apprenant de nouvelles compétences qui réduiront la difficulté.
2. La concentration est intense sur l’action en cours dans le moment présent. Pas de place pour la distraction, les pensées et émotions négatives.
3. Des objectifs clairs : savoir ce qui a besoin d’être fait et comment y répondre procure un sentiment de maîtrise et de contrôle.
4. L’activité fournit une rétroaction immédiate, ce qui permet d’adapter rapidement son comportement selon la réussite et les difficultés. C’est par exemple le sculpteur, le potier, le dessinateur, le jardinier en train de tailler qui corrige son geste à chaque instant en fonction de la courbe obtenue. En l’absence de ce feedback, on perd facilement l’intérêt voire le sens pour l’activité qu’on pratique.
5. La perception du temps est altérée. Les heures passent comme des minutes. Le temps s’adapte à l’expérience, alors que d’habitude on pense le contraire. Le temps n’est plus une contrainte où l’on doit ranger chaque moment de notre vie dans les diverses parties qui le composent. Le temps s’adapte à la façon dont on ressent les choses.
6. Perte de la conscience de soi.
7. L’engagement de l’individu est si profond qu’il oublie certains besoins (nourriture, repos…)
8. Sentiment de bien-être puis d’extase lorsqu’une récompense tombe : celle d’avoir dépassé ses limites ou réussi une performance de haut niveau.
A l’école, au travail
Dans l’éducation, Csikszentmihalyi a suggéré que sur-apprendre une compétence ou un concept qui peut aider les gens à vivre le flow. Sur-apprendre signifie simplement effectuer une tâche qui dépasse légèrement le niveau de compétence actuel d’une personne. Ce léger stress, ce challenge peut ainsi aider un individu à vivre le flow.
Au travail : Le flow peut se produire par exemple lorsque des collaborateurs travaillent ensemble sur un même projet en synergie. Le but étant ici d’apprécier de faire de son mieux dans son travail, tout en contribuant à quelque chose au-delà de soi-même.
Csikszentmihalyi a insisté sur le fait qu’il fallait attribuer selon la personnalité de chacun, des tâches motivantes et un peu ardues pour générer cet état de flow. Pour cela, il faut que les tâches suivent 3 conditions:
– Objectif clair pour l’individu.
– Retour immédiat sur la qualité du travail effectué pour motiver l’employé.
– Equilibre entre le challenge et le niveau de compétence demandé.
Les employés peuvent ainsi s’épanouir et développer leur capacité émotionnelle, cognitive et sociale.
Créer un environnement de travail qui permet de se concentrer sur une tâche et de vivre le flow, accroît largement le bonheur et le sentiment d’accomplissement des salariés. Le flow accroît la performance et est un facteur de réussite.
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